Nous avons la chance de vivre une période vraiment intéressante, dont on se souviendra sans doute comme de la "révolution numérique". Mais dans ces décennies passionnantes où il y a apparemment une multitude d'opportunités, il y a aussi une pression tout aussi immense qui nous incite à être parfaits, efficaces, rapides, leaders et impeccables.... Et il y a la pression de la quantité de connaissances que nous devrions intérioriser qui cause indubitablement un sentiment de perte ...
Mais comment gérer tout ça? Comment pouvons-nous aider nos enfants à vivre pleinement leur vie, leur temps, en évitant ce piège?
Pour moi, l’une des approches les plus attrayantes est de freiner cette accélération folle. En ralentissant. Pour laisser le temps aux choses présentes. Se perdre dans les détails, se perdre dans le jeu, dans la danse, dans le chant, dans les lectures dans les promenades, pouvoir avoir le temps d'admirer les petites choses ... et se perdre dans l'art. Dans l'art de vivre au présent.
Et c'est pourquoi dans l'atelier, je mets l'accent sur la broderie à la main. Je pense que la broderie est l'activité qui m'aide le plus à transmettre aux élèves l'importance, ou plutôt la nécessité de savoir ralentir. La broderie est extrêmement méditative, et c'est difficile pour cette raison. Je ne nie pas qu'au début, quand je propose aux enfants de commencer à broder un détail, ou le visage d'une poupée, l'idée n'est pas reçue avec beaucoup d'enthousiasme. "Ou pas, cela durera toute une vie ..." - J'entends souvent des enfants s'exclamer ... Et ils commencent à faire des points énormes ... rapide, hâtive. Mais la broderie ainsi réalisée n'est pas belle .... Ce n'est pas grave - je dis. - La prochaine sera plus belle.
Et en fait, la nécessité de bien le faire se pose souvent en leur sein. Et comme le temps passe, et ils comprennent qu'il n'est pas si mal de passer du temps à répéter des gestes et à prêter attention aux détails. J'ai des filles qui viennent parfois à l'atelier en disant que - aujourd'hui je veux juste broder, j'ai tellement de choses en tête! Et elles s'assoient et se perdent dans leur silence intérieur, et elles brodent, elles brodent ... Et je les laisse faire. Le temps que nous pouvons consacrer à notre silence est si peu et si précieux, et nos enfants en ont tellement besoin.
De ce point de vue, donc, les travaux finis pour moi ne sont pas seulement de magnifiques broderies, mais ils sont les témoins des chemins intérieurs, des voies de connaissance qui conduisent mes éleves vers eux-mêmes, dans leur univers lent et silencieux.


